• August 2016
  • Stanislas Haquet
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Les entreprises sont aujourd’hui confrontées à deux enjeux majeurs et totalement interconnectés.

Elles doivent tout d’abord faire face à une incroyable accélération du rythme des évolutions exogènes auxquelles elles sont confrontées. Ces évolutions sont de plusieurs ordres : consuméristes, réglementaires, générationnelles et bien entendu technologiques (dont on considère que le rythme double désormais toutes les décennies !)

Pousser à réfléchir, inciter à agir

Ces mêmes entreprises constatent pourtant dans le même temps qu’elles perdent une partie de leur attractivité, notamment auprès des plus jeunes générations (les Y et plus encore demain les Z), qui se projettent autant dans l’entrepreneuriat que dans le salariat (selon une étude Universum menée auprès de 46 000 Gen Z dans 46 pays, 43 % d’entre eux souhaitent développer leur propre business directement après leurs études). Autre signe inquiétant : le désengagement* constaté en entreprise. Les chiffres varient d’une année et d’un pays à l’autre mais, selon les études Gallup, qui font référence en la matière, moins d’un collaborateur sur 5 est engagé, c’est-à-dire, si l’on s’en tient à la définition « officielle », prêt à déployer un effort discrétionnaire dans son travail.

On voit là se dessiner une inextricable quadrature du cercle : les entreprises doivent se transformer ; c’est à ce prix qu’elles répondront aux attentes des prochaines générations (consommateurs, citoyens ou salariés). Mais pour se transformer, elles doivent pouvoir attirer les meilleurs talents et compter sur l’engagement de leurs collaborateurs. Ce qu’elles ne réussiront pas à faire sans se transformer…

Face à ces enjeux majeurs et interconnectés, les entreprises cherchent des réponses appropriées. Mais la manière dont elles adressent ces problématiques d’engagement et de transformation peut interpeller. Elle se heurte à plusieurs écueils.

  • Le changement est souvent envisagé, notamment par les cabinets de conseil, en mode projet, comme un processus linéaire avec un début et une fin. Est-ce vraiment approprié quand on connaît la permanence des transformations à opérer ? Ne faudrait-il pas en premier lieu développer la capacité de changement de l’entreprise et de ses collaborateurs ?

 

  • Les DRH et les directions de la communication (quand ces dernières ne se contentent pas d’informer, on y reviendra) actionnent aujourd’hui principalement le levier managérial. En clair, engager et transformer le management doit selon elles permettre d’engager et de transformer par ricochet l’ensemble de l’organisation. Mais s’appuyer sur les managers prend du temps (un temps peu compatible avec l’accélération évoquée plus haut) et se révèle souvent au final inefficace. Comment imaginer que des managers qui ont eux-mêmes du mal à comprendre et assumer leur rôle soient à même de mobiliser leurs équipes et de les préparer à la succession de transformations qui les attendent ?

Ces écueils incitent à repenser la communication au sein des organisations et à considérer que leur mission est aussi de faire réfléchir et d’inciter à l’action.

Si les directions de la communication sont en effet certainement les mieux armées pour pouvoir toucher efficacement et simultanément un grand nombre de collaborateurs, créer de l’enthousiasme et inspirer le changement, force est de constater que ce n’est pas toujours le cas. Elles s’en donnent en réalité rarement la mission et les moyens.

Leurs actions semblent souvent pensées dans un schéma inopérant ou tout du moins largement insuffisant pour engager et transformer. Ce schéma de pensée s’articule autour du triptyque : informer / expliquer / convaincre.

Le nouveau paradigme dans lequel elles évoluent (passage d’un protocole d’autorité à un protocole d’agrément) devrait les pousser vers un triple mouvement :

  • Informer > Toucher

 

  • Expliquer > Faire réfléchir

 

  • Convaincre > Inciter à agir

Ce nouveau schéma (toucher / faire réfléchir / inciter à agir), réflexif et performatif, ouvre de nouveaux horizons.

  • Il replace la communication au centre du jeu, en lui assignant une mission plus stratégique, en lien direct avec la culture et, indirectement, la performance de l’entreprise. Il ouvre de ce fait également de nouvelles perspectives pour la mesure de l’efficacité de son action.
  • Il impose la communication comme le partenaire privilégié des DRH, des directions de la stratégie et de l’innovation.
  • Il transcende dans le même temps les frontières entre communication interne et communication externe (dans une vision de communication globale, ou totale, qui mobilise aussi bien l’externe pour faire bouger les lignes en interne que l’interne pour faire bouger les lignes à l’externe).

Ce nouveau schéma demande cependant à la communication, si elle veut engager et transformer, de se transformer elle-même.

De nouvelles disciplines vont devoir être explorées (sciences cognitives, comportementalisme…), de nouvelles compétences vont devoir être acquises et de nouvelles modalités d’action envisagées (je pense par exemple au nudge ou à la gamification). C’est sans doute à ce prix que la communication renforcera dans les prochaines années son influence, son pouvoir.

Le chantier est ouvert ; il est réellement passionnant !