• April 2016
  • Stanislas Haquet
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Respect, intégrité, esprit d’équipe, excellence… Cela vous dit quelque chose ?

Si votre entreprise dispose d’un corpus de valeurs, il y a fort à parier qu’au moins l’un de ces quatre noms communs en fait partie. Mais peut-être n’en êtes-vous même pas certain. Vous avez beau en effet les avoir lus, vus, entendus à plusieurs reprises, il vous est sûrement difficile de les citer. Je vous rassure, rien d’étonnant, et surtout rien d’anormal.

Un moteur de transformation culturelle de l’entreprise

La plupart des entreprises ont fait (et font toujours) le choix de valeurs particulièrement neutres. Elles ne provoquent que peu de réactions particulières, n’incitent ni à s’interroger ni à agir différemment. Elles s’oublient vite.

La manière dont les valeurs sont définies est souvent responsable de cette insignifiance. L’enfer étant pavé de bonnes intentions, la plupart des entreprises partent pourtant souvent d’une ambition louable à l’heure de les faire émerger : interroger les collaborateurs sur les valeurs qui leur paraissent exprimer le mieux la culture actuelle de l’entreprise.

En la matière, chercher le consensus est souvent la meilleure façon de retomber sur ce qui fait le plus petit/le plus faible dénominateur commun : respect, intégrité, esprit d’équipe, excellence et consorts, quels que soient le secteur d’activité, l’histoire, la structure, l’origine géographique et la taille de l’entreprise

Et pourtant, dans le même temps, tout le monde ou presque s’accorde à dire que la culture d’entreprise, dont les valeurs sont, avec les rites, les mythes et les tabous, une composante fondamentale, est un facteur essentiel de performance, d’attractivité ou encore de différenciation. Quel paradoxe !

  • Bien heureusement, des contre-exemples existent. Certaines entreprises ont su investir de manière forte, tant sur le fond que sur la forme, leur système de valeurs. Zappos en est sans doute l’exemple le plus célèbre.
  • La plupart des 10 valeurs de la firme de Las Vegas, désormais connue comme le chantre de l’holacratie, ne ressemblent à aucune autre (on pourrait citer, entre autres, Be humble, Deliver wow through service, Create fun and a little weirdness…).
    L’adéquation aux valeurs de l’entreprise est un élément central des critères de recrutement ou d’évaluation de la performance de chaque collaborateur.

Tony Hsieh, le fondateur de Zappos, décrivait il y a quelques années dans la Harvard Business Review la manière dont ces valeurs avaient été définies et déployées, quelques années seulement avant la création de l’entreprise. C’est bien lui, personnellement, qui a « commencé à écrire ces valeurs » (sic), c’est toujours lui qui a engagé la discussion sur la base des valeurs qu’il imaginait avec ses salariés, et c’est enfin lui qui a arrêté la liste définitive des valeurs et leur a donné de la chair.

La méthode employée par Zappos (partir autant d’une vision de ce que devrait être la culture d’entreprise que d’une réalité constatée) correspond sans doute assez bien au final à la théorie des valeurs de Patrick Lencioni. Si elle date déjà un peu (2002), la manière dont ce dernier aborde la question des valeurs d’entreprise me paraît toujours particulièrement pertinente.

Il distingue notamment les valeurs fondamentales (core values) et les valeurs aspirationnelles. Les valeurs fondamentales sont les principes profondément enracinés qui guident aujourd’hui et depuis plusieurs années les actions d’une entreprise. Elles servent de piliers de la culture. Ces valeurs peuvent révéler la spécificité d’une entreprise – son identité de marque et d’employeur. Les valeurs aspirationnelles sont les valeurs dont l’entreprise a besoin pour réussir son projet stratégique ; elles peuvent éventuellement manquer aujourd’hui.

On voit bien à cette aune la manière dont les valeurs, et surtout la réflexion à mener sur les valeurs, initiée par la direction générale à partir de son projet stratégique, peuvent servir la transformation. En comparant les valeurs fondamentales et les valeurs aspirationnelles, on peut ainsi évaluer le gap entre la culture actuelle et la culture cible et réfléchir (et surtout faire réfléchir les collaborateurs) à la manière, concrète, de le réduire.

Dans cette perspective, les valeurs peuvent devenir bien autre chose qu’un corpus de signifiants pratiques affichés et ou même un référentiel pour le recrutement : un des points de départ d’une démarche de transformation culturelle réussie.