• February 2019
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Voilà de nombreuses années qu’on le sait : les entreprises, pour innover, rester agiles et être en mesure de se doter des compétences indispensables à la réussite de leurs multiples projets, ne pourront plus (si tant est qu’elles le puissent déjà) s’appuyer uniquement sur leurs propres salariés. Elles doivent s’ouvrir peu à peu et intégrer dans leurs équipes, dans une vision holistique de leurs ressources, de nombreux partenaires externes : fournisseurs, start-up, free-lances, experts, animateurs de communauté…

4 idées pour accompagner l’entreprise étendue

Autant de parties prenantes qui contribuent désormais aux projets et AU projet de l’entreprise.

La frontière entre in et out ou entre salariés et contributeurs externes s’estompe d’autant plus que, dans le même temps, les salariés sont eux de plus en plus mobiles, à la recherche d’autonomie, intéressés davantage par les projets à mener dans l’entreprise que par l’entreprise elle-même, et se montrent adeptes du télétravail et du slashing (le cumul de plusieurs emplois). Bref, qu’ils se comportent parfois d’avantage comme des contributeurs que comme des salariés.

Le phénomène n’est pas nouveau, je le répète. Mais il s’amplifie, et ce n’est certainement que le début de l’histoire. L’une des conséquences annoncées : la modification profonde de la notion même de ressource dans l’entreprise et, par conséquent, du métier des ressources humaines.

Et pourtant, on voit encore trop peu de DRH prendre vraiment le sujet à bras-le-corps et entreprendre la nécessaire transformation culturelle que l’entreprise étendue impose, se retranchant le plus souvent derrière les contraintes et risques supposés qu’engendre l’entreprise étendue (droit du travail, perte de son avantage compétitif, manque de contrôle…).

Les pistes de réflexion et les actions à mener sont nombreuses et devraient être rapidement préemptées par les RH, avant qu’il ne soit trop tard (si ce n’est pour leur entreprise, du moins pour elles-mêmes). En voici quatre, sans ambition d’exhaustivité.

1. Préparer ses collaborateurs

La capacité à travailler en réseau, à collaborer ou à faire collaborer ensemble des salariés, des startupers et des free-lances ne se décrète pas. Elle se travaille. Comment ?

En abordant la notion de diversité sous un prisme nouveau (au-delà de la diversité de genre et de la diversité ethnique) et en en faisant un véritable cheval de bataille. L’objectif : que l’entreprise et la communauté de collaborateurs salariés qui la constitue aujourd’hui ressemblent déjà le plus possible à la «société» ; recruter d’anciens startupers, s’ouvrir à des profils atypiques (un philosophe, un artiste)… Les possibilités sont nombreuses.

En développant ensuite le quotient émotionnel et relationnel de ses collaborateurs. Car «être open», fonctionner en réseau, est loin d’être simple. Cela ouvre un large spectre de réflexion pour de nouvelles formations permettant de développer les soft skills qui s’avéreront indispensables demain.

En en faisant un enjeu managérial. Comment imaginer en effet que des managers déjà démunis aujourd’hui quand il s’agit de gérer des équipes multiculturelles et multigénérationnelles de salariés sauront gérer demain des équipes projet mixtes sans y être spécifiquement préparés ? Là encore, de nouveaux modules de formation doivent certainement être intégrés aux programmes existants pour répondre à ces enjeux.

2. Raisonner en termes d’expérience et d’engagement

« Expérience », « engagement » : voilà deux sujets dont les DRH semblent se saisir fréquemment pour leurs collaborateurs mais plus rarement (en ce qui concerne l’expérience) voire beaucoup plus rarement (en ce qui concerne l’engagement) pour les autres contributeurs à leurs projets.

Là encore, beaucoup de choses peuvent être imaginées.

Côté expérience : analyser l’ensemble du parcours depuis le recrutement jusqu’au débrief en prenant en compte, par exemple pour les free-lances, l’onboarding, la formation et la création d’interactions durant les intermissions.

Côté engagement : réfléchir à la manière d’adapter aux autres contributeurs au projet de l’entreprise l’ensemble des leviers qui contribuent à l’engagement des salariés et notamment :

– la raison d’être et l’impact RSE de l’entreprise ;

– la valorisation des individus et de leur impact sur le résultat de l’entreprise.

3. Animer les contributeurs dans une logique de communautés

Le community building, ou la science de la création et de l’animation de communautés, est une compétence devenue cruciale pour les entreprises. Il s’applique également aux parties prenantes des entreprises étendues. Les entreprises ont tout intérêt à fédérer ces parties prenantes en communautés et, pour cela, à suivre plusieurs règles élémentaires comme :

– hiérarchiser les parties prenantes/contributeurs et engager en priorité celles/ceux qui cumulent pouvoir, interdépendance et légitimité ;

– nommer des community managers et bâtir des plans d’animation ;

– identifier au sein de ces communautés des alliés, des ambassadeurs ou des relais.

4. Décloisonner, décloisonner et décloisonner encore

Le principe même de l’entreprise étendue ou en réseau est de faire travailler ensemble des acteurs venus d’horizons différents sur un même projet. Or, trop souvent, là encore, les entreprises raisonnent de manière trop verticale, en réfléchissant à la manière dont elles animent leurs collaborateurs d’un côté, leurs free-lances ou leurs partenaires de l’autre. Il est grand temps au contraire de tout mélanger. Des communautés oui, mais des communautés thématiques, in and out, réunies autour de projets mais aussi, pourquoi pas, de grandes thématiques porteuses d’intérêt. La démarche de l’ENGIE People’s Lab, qui regroupe « des étudiants, des salariés, des juniors et des seniors […] sur des sujets d’innovation engagée », en est un exemple particulièrement inspirant.

Et pour stimuler la découverte et les échanges entre les différents contributeurs de l’entreprise étendue de manière plus informelle encore, pourquoi ne pas envisager le corpo-working, le travail dans des espaces de coworking ouverts dans les locaux ou en dehors de l’entreprise, où se côtoient salariés, free-lances et startupers, à l’image de la Villa Bonne Nouvelle d’Orange.

Ces quatre exemples le montrent : le champ d’expérimentation (et donc le terrain de jeu potentiel) des RH est particulièrement vaste en la matière. Reste bien entendu à vouloir l’aventure et, pour cela, à faire évoluer l’état d’esprit et le cadre de référence même des ressources humaines. Une belle ambition. Un beau projet à partager. Et pourquoi ne pas commencer par changer de nom de manière symbolique, en passant par exemple de Direction des Ressources Humaines à Direction des Réseaux Humains ?

À suivre…