• March 2017
  • Stanislas Haquet
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  • RSE

Les entreprises investissent de plus en plus l’écoute des réseaux sociaux et du web social. Derrière cette pratique, plusieurs objectifs sont poursuivis : mieux comprendre les thématiques qui intéressent leurs parties prenantes (clients, partenaires…), mieux appréhender leur opinion ou encore identifier les influenceurs et les communautés à adresser. Ces pratiques s’avèrent même essentielles pour être en mesure de mettre en place des stratégies de contenu ciblées et performantes.

RSE contre études communautaires

À mesure que se développent les réseaux sociaux d’entreprise (RSE), ces pratiques infusent peu à peu la communication interne. Il est tentant en effet d’appliquer les mêmes recettes à la communication interne, de se servir de la démocratisation des Yammer, Workplace et autres pour écouter ce qu’il s’y dit, mesurer l’adhésion aux politiques de l’entreprise, comprendre les forces en présence, identifier les influenceurs (qu’ils soient opposants, engagés ou concertatifs)…

Cette idée, aussi séduisante soit-elle, se heurte néanmoins, me semble-t-il, à plusieurs écueils.

  • Le succès encore relatif des RSE. Ce n’est pas un secret ; beaucoup d’entreprises reconnaissent aujourd’hui que l’adoption de leur RSE n’est pas à la hauteur de ce qu’elles espéraient. Les usages restent en effet souvent limités au partage d’informations et à la collaboration sur certains projets. Les RSE ne peuvent pas (encore) être, la plupart du temps, considérés comme de véritables lieux de discussion. L’intérêt de leur écoute dans une optique de mesure de l’opinion est de ce fait limité.

 

  • L’absence d’anonymat des RSE. C’est un phénomène qui a été décrit au sein des réseaux sociaux externes (lire notamment le point de vue du gourou web Bill Tancer) : les internautes, parlant à visage découvert, ne disent souvent pas ce qu’ils pensent mais ce qu’ils pensent devoir dire pour briller. Ce phénomène est forcément renforcé dans un contexte de subordination comme celui de l’entreprise, où il est difficile d’imaginer que de réelles opinions soient émises sans arrière-pensées du type : « Que pensera mon manager si je me permets de critiquer l’entreprise et sa culture ? » De ce fait, l’écoute des RSE pour mesurer l’opinion pourrait amener au final à se tromper de diagnostic.

 

  • La question éthique. C’est une dimension qui ne doit certainement pas être oubliée, sous peine notamment de compréhensibles frottements avec les instances représentatives du personnel. Les réseaux sociaux internes, s’ils ont vocation à devenir des lieux de discussions franches et honnêtes, doivent rester des espaces de liberté d’expression. Cela ne sera plus le cas si ces réseaux sociaux internes sont scannés, scrutés : qui pourra en effet assurer que ce qui se dira, même au sein d’espaces annoncés comme privés, ne pourra pas se retourner contre les salariés eux-mêmes ?

L’écoute des réseaux sociaux internes, si elle permet certainement d’identifier les sujets susceptibles d’intéresser l’interne et de révéler certains influenceurs, pose donc certaines questions, comme on vient de le voir.

Heureusement, d’autres solutions digitales, complémentaires, existent pour prendre en ligne le pouls de l’entreprise. C’est notamment le cas des études communautaires.

Sur un principe plus proche des forums thématiques et des panels d’opinion que des réseaux sociaux, les salariés d’une entreprise sont invités à venir s’exprimer et à dialoguer entre eux ou avec des tiers (dirigeants notamment) sur des sujets clairement définis : stratégie d’entreprise, culture interne, politique RH, marque employeur… Ils peuvent aussi réagir à des propositions d’actions de la direction, voire co-créer un nouveau concept produit, un plan d’action, une campagne RH…

Ces démarches se distinguent par bien des aspects de celles des réseaux sociaux. Elles sont totalement transparentes – elles ont pour objet d’étudier l’opinion et sont présentées comme telles – et anonymes – pour s’inscrire, les participants communiquent à la plateforme leur identité, mais celle-ci n’est jamais révélée.

Les technologies existent. Elles permettent d’aller loin dans l’analyse des conversations. Ne reste plus qu’à se saisir des opportunités qu’elles offrent !