• April 2018
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Dans l’excellente romance de science-fiction Her, l’« ordinateur » de Joaquin Phoenix tient dans son oreille. Pas d’écran, pas de clavier : une pure interface vocale, dont d’ailleurs il tombe amoureux. Miniaturisation extrême et sentiments mis à part, le « web de la voix » est… déjà là. Cette révolution s’appelle Apple Siri, Google Home ou Amazon Echo. Et si la commande vocale est sur le point de bouleverser les interfaces et la technologie des sites web, elle reconfigure aussi les enjeux du search et les stratégies de contenu qui en découlent.

SEO vocal

Google annonce avoir vendu plus de 6 millions d’enceintes connectées intelligentes. À ce parc considérable, il convient d’ajouter les produits concurrents, notamment Echo d’Amazon, qui n’est pas encore disponible en Europe, et surtout les assistants vocaux sur smartphone, qui drainaient fin 2017 75 % du volume des requêtes vocales. La technologie existe. Elle est non seulement fonctionnelle, mais déjà largement déployée. Et le bénéfice qu’elle procure est tellement évident que le cabinet Gartner annonce une explosion de la recherche vocale, qui pourrait représenter en 2020 30 % du volume global du search1.

Écrire comme on parle

Dans un contexte de commande vocale, l’essentiel des requêtes utilisateurs est formulé sous forme de questions. Nous nous adressons naturellement à Google Home comme à une personne quand nous lui demandons : « OK Google. Comment débugger ma box Free ? », là où sur un clavier nous saisirions : « bug box Free ».

Une recherche vocale est donc plus gourmande de mots qu’une requête SEO textuelle, composée en moyenne de 3 keywords. Et surtout sa syntaxe est très différente : il s’agit d’une phrase complète intégrant de façon quasi systématique un adverbe interrogatif (comment ? où ? combien ? etc.), des articles, des adjectifs possessifs, des formes verbales conjuguées… Autant d’éléments « variables » qui complexifient la tâche du moteur de recherche et qui accéléreront la transition d’un SEO sémantique vers un SEO syntaxique dans lequel l’intelligence artificielle aura tout son rôle à jouer pour saisir le contexte, les nuances, les intonations et rapprocher encore davantage la « langue de Google » de celle que nous utilisons.

Ces spécificités de la recherche vocale impliquent d’intégrer dans les textes des chaînes verbales plus longues, des formules interrogatives, notamment au niveau de la titraille, de faire preuve également d’une empathie linguistique parfaite avec les utilisateurs, pour parler comme ils parlent, employer les mêmes mots, mais aussi de déployer un tone of voice plus conversationnel, plus parlé, plus proche. Et d’oublier au passage certains diktats éditoriaux qui circulent encore et qui voudraient qu’écrire sur le web implique nécessairement de faire des phrases courtes.

Le retour de la longue traîne

Si le SEO vocal rebat les cartes du référencement, c’est aussi parce que dans l’univers vocal le gagnant prend vraiment tout. Les assistants vocaux visent à donner UNE SEULE réponse. Et même quand ils proposent plusieurs liens, les dimensions de l’écran d’un smartphone limitent fortement le nombre de ceux-ci, ce qui donne encore plus de poids exclusif au site et à la marque qui trusteront la première position.

Heureusement, cette prime quasi monopolistique au gagnant est contrebalancée par la grande variabilité des requêtes vocales : il ne s’agit plus de préempter quelques dizaines de mots-clés et leurs combinaisons, mais des milliers d’expressions libres et vivantes. C’est le retour de la longue traîne, avec une multitude de requêtes drivant de microvolumes de recherches, qu’il s’agit d’adresser avec des contenus à l’anglage millimétré et qui contribueront à réinventer l’exercice de la FAQ, de la fiche pratique, du tutoriel, etc., mais aussi à définir de formats nouveaux, comme l’abstract sur des sujets réglementaires ou techniques : « Que dois-je savoir de la nouvelle loi sur le prélèvement à la source ? » ou « À quoi sert la blockchain en RH en une minute ? » Conséquence : un retour en puissance prévisible du search dans le mix de trafic des sites, au détriment de la part d’audience provenant des partages sociaux. Non, le Google peak n’est vraiment pas derrière nous !

Commande vocale : quels contenus ? Quels contextes de consultation ?

Si l’usage de la commande vocale est acquis pour des requêtes pragmatiques comme la recherche d’une adresse, d’un itinéraire ou la vérification d’un horaire, il monte désormais pour des contenus serviciels BtoC et BtoB : FAQ, tutoriels, avis clients, fiches produits, avis clients, recettes, modes d’emploi, textes ou abstracts réglementaires, etc. Et ce, a fortiori, dans un contexte où l’utilisation d’un clavier est malaisée ou impossible (en voiture, dans une cuisine, un atelier…) et où l’attention de l’utilisateur n’est pas exclusive.